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Le cabaret des mémoires (Joachim Schnerf)

Le cabaret des mémoires - Joachim Schnerf

La mémoire ne doit pas flancher

Trois lieux et trois temporalités. Rosa, une vieille dame en Amérique qui témoigne chaque soir dans son cabaret de son expérience de la déportation, son petit neveu Samuel qui, en France, vient d'être papa et, mes passages préférés, les souvenirs de jeux d'enfants de Samuel avec sa soeur et son cousin alors que, dans la forêt vosgienne, ils fantasmaient le far-west de leur grand-tante, le personnage mythique de la famille.

J'ai vécu la lecture du beau et court roman de Joachim Schnerf Le cabaret des mémoires comme je vivrais celle d'un conte un peu irréel où lyrisme et onirisme se mêleraient aux drames de l'Histoire, un peu à la manière du Soldat désaccordé de Gilles Marchand qui se jouait de la première guerre mondiale. Pourtant, à chaque fois, le sujet est grave et le message essentiel.

La mémoire, notion aussi capitale que fragile. Samuel mesure le poids de son rôle dans l'éducation de son fils nouveau né quand il sera en âge d'entendre mais que la dernière survivante d'Auschwitz aura disparu. Il faut absolument que les générations suivantes n'oublient pas.

"Lorsque l'ultime survivant des camps de la mort aura disparu, il ne pourra se rappeler ces visages qui hantent mes nuits. Combien de remps reste-t-il avant que les captations remplacent définitivement les mains crispées, que les récits publiés arrêtent d'être portés par ces voix reconnaissables entre mille ? Rosa et son tatouage disparaîtront si notre enfant ne peut rendre visite à son arrière-grande-tante dans le cabaret de Shtetl City ; même en histoire, même en rêve."

Une démarche indispensable. Un beau roman éloquent.

Grasset - pages 62 et 63

Alors je construis une histoire quitte à maltraiter l'image de ma grande-tante ; gêné mais soulagé je la réciterai à mon fils car lui ne se souviendra pas du regard des rescapés.
Lorsque l'ultime survivant des camps de la mort aura disparu, il ne pourra se rappeler ces visages qui hantent mes nuits. Combien de remps reste-t-il avant que les captations remplacent définitivement les mains crispées, que les récits publiés arrêtent d'être portés par ces voix reconnaissables entre mille ? Rosa et son tatouage disparaîtront si notre enfant ne peut rendre visite à son arrière-grande-tante dans le cabaret de Shtetl City ; même en histoire, même en rêve.

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