Le dentier de la prostituée
Franz Bartelt est très fort. Il réussit admirablement ce polar déjanté, bourré d'humour et d'esprit. Le narrateur, cet homme sans nom, cet anti héros, est une petit frappe crâneuse au bagout prolo qui, à ses heures, devient poète intello au langage soigné. Lui, il s'en fiche car il a de nobles idées "basées sur l'idée de gauche" (voir extrait ci-après) mais pour combler les instincts vénaux de sa petite amie, il a bien l'intention de détrousser un présentateur de télé-achat dont la qualité première est d'être riche comme Crésus. C'est le début des ennuis.
Très fort(e) aussi celle ou celui qui voit venir le dénouement. Il m'a laissé un peu baba mais bien sûr pas autant que le narrateur lui-même qui tombe de haut quand la vérité lui apparaît. La fin est donc inattendue, l'intrigue est baroque, les rebondissements valent leur pesant de cacahuètes et le style, lui, casse tout sur son passage, tant il est jubilatoire. Je me souviendrai longtemps de l'extrait haut en couleurs de la visite de la prostituée "sans dents".
Le jardin du bossu est en somme un excellent morceau de littérature dont le seul défaut est peut-être d'être trop abracadabrant. Il amuse et distrait sans l'ombre d'un doute, il touche beaucoup moins, selon mes critères, pour rester une lecture inoubliable.
Folio - page 112
Comme la veille et comme le matin, j'ai recompté le pognon en l'étalant sur le lit. Ça m'excitait, parce que ça me faisait pense à Karine. Devant un tel pouvoir d'achat, elle allait tomber dans mes bras comme un fruit mûr, m'aimer si fort que ça en deviendrait presque gênant pour mon humilité d'homme basée sur l'idée de gauche. A l'heure qu'il était, elle avait lu et relu mon message et elle prenait des dispositions pour me récupérer en bonne et due forme.
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