Épopée nationale
14 juillet n'est pas un roman. C'est un récit qui raconte la prise de la Bastille du point de vue du peuple parisien et non plus sous l'angle de la grande Histoire, celle officialisée par les grands de ce monde qui explique les tenants et aboutissants de la survenance d'un événement fondateur, du moins en terme de symbole, de la nation française. Le 14 juillet 1789, une lame de fond résultat de siècles de mépris de la part des classes dirigeantes et bourgeoises, fit paradoxalement converger presque spontanément des dizaines de milliers de gens au pied de la citadelle de la Bastille, symbole de l'arbitraire royal, pour la faire tomber. Personne, à ma connaissance, n'avait raconté comment cette folle journée a été vécue par ceux qui y ont participé. La raison en est sûrement que personne ne le sait, les protagonistes ayant laissé peu, voire pas, de témoignages.
Après renseignements, les événements dépeins sont bien ceux de l'histoire officielle, sauf que l'auteur les a contextualisés, pour ne pas dire romancés, dans un récit en mouvement et personnifié par les héros de cette journée. Il égraine ainsi des noms et des professions sans que l'on sache s'ils sont inventés ou s'ils sont sortis d'une quelconque archive. La plume est très belle, poétique à souhait même si elle m'est apparue parfois trop littéraire et grandiloquente pour parler au nom d'une population déshéritée. Le style fait pourtant mouche et introduit un souffle ambitieux et exalté. En refermant le livre, on a le sentiment qu'Éric Vuillard a écrit un ouvrage qui manquait à l'épopée nationale.
Babel - page 58
Pendant la nuit du 13 au 14 juillet, qui est, je crois, la nuit des nuits, la Nativité, la plus terrible nuit de Noël, l'Événement, la canaille, comme on dit, les plus pauvres en somme, ceux que l'Histoire a jusque alors laissé croupir dans le caniveau, armés de fusils, de broches, de piques, se font ouvrir les portes des maisons, et se font servir à manger et à boire. Désormais, la charité ne suffira plus. Ce sont des vagabonds d'une physionomie effrayante, disent les chroniqueurs. Des bandes de bourgeois circulent pour rétablir l'ordre ; et on pendit aux lanternes quelques pauvres, ça et là, que l'ont achevait à coups de fusil.
Bonjour Sorel, j'ai découvert Eric Vuillard avec ce récit que j'ai beaucoup aimé. On s'y croirait. J'ai lu qu'il avait épluché des archives pour trouver des noms et des professions de cette époque. Pour info, la Bastille a été "prise" le 14 juillet mais il a fallu plus d'un an pour la démolir. C'est une personne privée qui s'en est chargée. Bonne journée.
RépondreSupprimerSalut Dasola, merci pour ces infos. Je ne savais pas pour les noms et les professions. Je ne suis pas surpris finalement.
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