Alice au pays de la Guinness
Le livre 1 de La symphonie du hasard scellait mes retrouvailles avec l'écriture prenante de l'auteur américain que j'ai tant lu par le passé. Parallèlement à ce plaisir non dissimulé, un soupçon de perplexité sur l'intérêt du sujet même de sa nouvelle œuvre m'avait gagné. Qu'a donc cette jeune Américaine de particulièrement intéressant pour qu'on suive son parcours personnel tout au long des années soixante-dix ?Avec le livre 2, le lecteur poursuit sa découverte des tribulations d'Alice Burns au cours de la décennie, à ceci près que l'étudiante en littérature a quitté le Maine pour intégrer Trinity College à Dublin. La principale valeur ajoutée des premières pages réside dans le portrait sans concession que l'auteur parvient à faire d'un pays et de ses habitants. Les Irlandais sont bruts de décoffrage (quand ils ne sont pas bigots), résultat d'une histoire nationale complexe dont les problèmes ne sont pas résolus. Alice poursuit son chemin, s'élance vers son destin, aidée en cela par les circonstances, les rencontres et l'influence d'une famille toxique qui la poursuit jusqu'en Europe. Au bout du compte, le destin, n'est-il pas ce que chacun fait du hasard et des inévitables choix qui en découlent ?
Après un début dans l'esprit du livre 1, un personnage au caractère complexe resurgit soudain du passé et les évènements se bousculent. Le contexte politique en Irlande et au Chili prend toute son place pour faire basculer le récit dans une autre dimension davantage proche de la littérature habituelle de l'écrivain en terme de tension dramatique. La fresque politique et sociétale bat son plein et se mêle au drame intime de la jeune fille. La fin de l'épisode est tragique. Douglas Kennedy a réussi son coup : la tentation est grande de saisir tout de suite le livre 3 pour connaître la suite et l'épilogue de la trilogie ...
Pocket - pages 9 et 10
Je ne m'attendais pas à un vocabulaire aussi fleuri - même de la part de ce chauffeur bedonnant en veste de faux cuir marron et casquette de tweed. Au cours du trajet depuis l'aéroport, durant lequel il n'a pas cessé de me parler et de fumer, je me suis vite rendu compte que, à Dublin comme dans le reste de l'Irlande, tout était "ce foutu ceci, ce foutu cela". Critiquer l'état du pays faisait partie du jeu, du moins jusqu'à ce qu'un étranger ait l'audace de proférer une petite remarque négative ; un fervent nationalisme reprenait alors le dessus. Et malheur à qui osait mentionner les Anglais - sauf, bien sûr, dans les cercles anglo-irlandais raffinés, où régnait toujours une certaine nostalgie pour l'esprit british, renforcée par l'influence encore prégnante de siècles d'histoire.
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