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La première chose qu'on regarde - Grégoire Delacourt


Etre ou disparaître

 
Un beau jour comme tous les autres, Arthur Dreyfuss ouvre la porte de sa petite maison de Picardie et se retrouve nez à nez avec ... Scarlett Johansson. La surprise est de taille pour ce jeune garagiste célibataire qui fantasme depuis toujours sur les femmes à forte poitrine. Mais comment Scarlett vit-elle le fait que la première chose, très souvent, qu'on regarde chez elle, ce n'est pas ... elle. Voici l'inattendu point de départ du dernier roman en date de Grégoire Delacourt, un troisième essai engageant à défaut d'être aussi réussi que le poétique 'La liste de mes envies'
 
L'accroche est croustillante, l'atmosphère oscille subtilement entre comédie et drame, c'est souvent drôle (c.f. le passage de l'interview avec la journaliste d'un canard local) et l'attachante poésie du quotidien de la France d'en-bas, celle qui fantasme sur le star-system (un grand nombre de vedettes sont citées), parcourt souvent les pages de ce joli roman qui traite de l'épineux sujet de l'être, du paraître et de la difficulté d'être soi.
 
Ensuite, j'avoue avoir été déstabilisé par l'effet brouillon de l'écriture hachée (et son étrange ponctuation) que l'écrivain a parfois délibérément utilisée pour cette histoire-là, dans l'espoir sûrement de lui donner plus de vie. L'ambiance un peu irréelle a fait aussi que parfois j'ai pu décrocher. Et la fin est un peu trop mélodramatique, non !?!
 

Le Livre de Poche - page 51

Et quand PP, la voix légèrement éraillée, confessa, après un peu de silence : tu sais Arthur, si j'étais né dans les années 1920 et que j'étais devenu le mec de Marilyn Monroe, jamais elle se serait empoisonnée avec toutes ces conneries ; je le sais. C'est pas des footballers, des acteurs, des présidents, des auteurs prétentieux et des gens qui s'aimaient plus qu'elle qu'il lui fallait, non ; ce dont son cœur avait besoin, c'était d'un gars simple, honnête, qui aime les autres, un garagiste, un type capable de l'emmener en auto voir des jolies choses, de baisser la capote, de lui faire respirer l'air roux d'un bel automne, de lui faire goûter la pluie, les minuscules gouttes remplies de poussière, gonflées de vent, de lui tenir la main, sans la serrer, sans l'étouffer surtout, sans chercher à la baiser sur la banquette arrière, ouais voilà ce que j'aurais fait avec Marilyn, et voilà pourquoi elle serait morte de vieillesse avec moi, ouais ; alors Arthur Dreyfuss eut envie de pleurer.

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