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La Terre (Émile Zola)

 La Terre - Emile Zola

C'est du Zola

La Terre est un tome des Rougon-Macquart particulièrement marquant. On a coutume de dire que la terre agricole en est le personnage principal, souvent comparée à une femme aussi bien féconde et nourricière que cruelle et sans merci. Elle est en tout cas l'objet de toutes les convoitises dans ce coin de campagne beauceronne sous le Second Empire. Paysans, grands propriétaires, ouvriers agricoles, commerçants, curés, instituteur, notaire, rentiers, politiciens et autres parasites participent à ce roman choral particulièrement sordide aussi bien dans son épilogue que dans son récit. Ici tout le monde en prend pour son grade dans une impressionnante fresque réaliste et dramatique. Chaque lecteur en sort admiratif et/ou dégoûté mais il est peu probable qu'il en sorte indifférent.

Il est frappant de voir combien Emile Zola prend le parti de décrire cette population rurale sans trop de filtres ni tabous : violence, sexualité exacerbée, jalousie, méchanceté, cupidité, vulgarité et j'en passe. Je ne me suis pas encore remis du concert de flatulences donné par le personnage surnommé Jésus-Christ. Il n'est pas anodin de remarquer que seul Jean Macquart, l'étranger, y apparaît raisonnable. C'est pourtant un Macquart.

La vision de Zola sur les campagnes, était-elle une réalité de l'époque ou le reflet de la vision des grandes villes ou simplement de la sienne ? Le récit est beaucoup plus feutré et les travers davantage sous-entendus dans les tomes plus bourgeois et aristocrates (Nana, La curée). Je n'ai pas le souvenir non plus d'une telle corruption et vulgarité dans des épisodes sur les milieux populaires et ouvriers de Germinal ou de l'Assommoir même si on atteignait quelques sommets d'âpreté.

Quoi qu'il en soit, je sais déjà que La Terre est un Rougon-Macquart magistral qui restera parmi mes préférés.

Folio classique - page 543

D'un geste large, il avait embrassé l'étendue, l'immense Beauce plate. Et lui, dans sa passion, voyait Paris, Paris entier, lâcher la bonde de ses fosses, le fleuve fertilisateur de l'engrais humain. Des rigoles partout s'emplissaient, des nappes s'étalaient dans chaque labour, la mer des excréments montait en plein soleil, sous de larges souffles qui en vivifiaient l'odeur. C'était la grande ville qui rendait aux champs la vie qu'elle en avait reçue. Lentement, le sol buvait cette fécondité, et de la terre gorgée, engraissée, le pain blanc poussait débordait, en moissons géantes.

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